Une maison de poupée
Les 1ères 2 médusées par un peuple de marionnettes arachnéennes inquiétantes !
Le vendredi 6 décembre, soir-même de la fête de l’établissement, les élèves de 1ère 2 ont eu grand peur : la vaste scène du théâtre de Sartrouville s’est peuplée, tout au long des 80 minutes de représentation, des présences envoûtantes de marionnettes de toutes tailles. Araignées de plus en plus géantes, animaux prédateurs, mais aussi personnages de chiffon à taille humaine dont la désarticulation suggérait l’inquiétante étrangeté d’une déshumanisation sociale mortifère.
Ajoutez à cela une musique stridente rappelant les bruits de couteaux ponctuant la saisissante scène de la douche dans Psychose d’Hitchcock…Vous aurez peut-être idée du climat anxiogène auquel nul dans la salle n’a pu échapper.
Pourquoi s’infliger une telle pression, en ce beau mois de Noël ?
« Yngvild Aspeli signe un spectacle extrêmement fort, qui met son intelligence de l’art marionnettique au service de la mécanique dramaturgique impitoyable inventée par son compatriote Henrik Ibsen. » écrit Le Monde. En effet, avec la toute puissance visuelle de son théâtre, la metteuse en scène et marionnettiste norvégienne s’empare de l’histoire de Nora, l’héroïne d’Une maison de poupée, pièce mythique du grand dramaturge du Nord.
L’action se passe en 1879, un peu avant Noël. Nora quitte mari, foyer et enfants pour vivre sa vie comme elle l’entend. Incroyablement en avance sur son temps, Ibsen signe avec Une maison de poupée le portrait d’une femme en quête de liberté. L’araignée qui ne cesse d’être en extension sur scène donne à voir le paysage mental de cette héroïne qui peu à peu prend conscience de la toile dans laquelle elle est enfermée, sous l’égide d’un mari qui l’infantilise, l’instrumentalise, la considère comme un simple pantin.
Peu à peu, la comédienne qui joue Nora se dédouble : la « vraie » femme regarde sa marionnette actionner ses pauvres membres, et l’aspiration à devenir soi-même, un être humain avant tout, peut advenir.
Parce que le théâtre, lorsqu’il est si éblouissant, donne à voir et à sentir cet appel à la liberté, il a été vital d’être là, ensemble, ce soir-là.
Carole Zegaa,
Professeure de lettres.